ALEA JACTA EST : LE SYNDROME JUPPÉ
Par Jacques BENILLOUCHE
copyright © Temps et Contretemps
Oui, «le sort en est jeté» selon la locution latine attribuée à Jules César. Cela signifie que les candidats s'en remettent à la chance, aux évènements sur lesquels ils n'auraient aucune emprise, n'ayant plus la possibilité de revenir sur ce qui a été commis. Alain
Juppé avait caracolé en tête des sondages pendant près d’un an pour être
ensuite lourdement éliminé aux primaires par un candidat qu’on n’attendait pas.
Ce souvenir est encore brûlant dans les esprits et surtout parmi ceux de ses
amis qui ont fait l’amère expérience d’une grande déception alors qu’ils
rêvaient déjà à la victoire.
Nul n’est à l’abri d’une surprise identique au
cours du premier tour de la présidentielle de 2017. Les Français sont très
anticonformistes et risquent de ne pas miser sur le Messie inspiré par les
media et par les États-majors des partis. Le syndrome Juppé hante les
candidats.
Il
faut se rendre donc à l’évidence que rien n’est encore joué dans ce combat
entre onze candidats dont certains ont été véritablement découverts à
l’occasion de leur prestation télévisuelle. Aujourd’hui, quatre candidats sont
dans un mouchoir de poche selon les sondages qui se sont souvent, sinon
toujours, trompés : Fillon, Le Pen, Macron et Mélenchon, dans l’ordre
alphabétique pour ne pas se risquer à les classer par ordre d’arrivée. Les
électeurs sont volatils et ne se décident plus sur un programme politique,
encore moins sur les actes et le passé des candidats, quel qu'il soit. Ils décident au doigt, selon leur humeur, selon leur état d’esprit
au moment de la décision suprême, en dehors de toute idéologie, de tout
raisonnement logique et de tout intérêt.
Fini
le principe des deux tours où durant le premier on choisit et durant le second
on élimine. On ne sélectionne plus, on saque, on détruit, on punit, on se venge
dès le premier tour, aidé souvent par les réseaux sociaux qui manipulent autant
qu’ils informent. On ne peut même plus croire aux affirmations de ceux qui sont censés
soutenir un candidat car en sous-main ils ont déjà désigné le véritable candidat
pour lequel ils conseillent de voter. La politique c’est le monde de la trahison.
![]() |
Chrirac - Chaban |
On
se souvient qu’en 1974 le jeune loup Jacques Chirac avait sabordé la
candidature gaulliste de Jacques Chaban-Delmas pour rallier le camp du futur
vainqueur, Giscard d’Estaing. Les jeunes loups d’alors avaient préféré casser
l'UDR plutôt que de soutenir le maire de Bordeaux dans un combat qu'ils
savaient perdu d'avance et parce qu’ils n’avaient jamais été adoptés par les
gaullistes historiques. Chacun des sondages défavorables à Chaban-Delmas
amenait dans le bureau du ministre de l'Intérieur une dizaine de députés qui
venaient annoncer qu’ils n'étaient plus sûrs de se battre à mort pour Chaban.
Jacques Chirac avait cassé le parti UDR avant le premier tour parce qu’il avait
un compte à régler qu’il a soldé en 1981 en favorisant ensuite l’élection de
Mitterrand pour avoir été trahi par Giscard.
On
se souvient aussi de l’élection présidentielle de 1995 où le gagnant des
sondages, Edouard Balladur avait été battu par Jacques Chirac alors que le RPR
était déchiré en deux camps. Édouard Balladur pouvait alors compter sur les
principaux ministres RPR, Nicolas Sarkozy, Charles Pasqua, François Fillon et
UDF, François Léotard, Pierre Méhaignerie, et François Bayrou. En revanche, les
ministres RPR Alain Juppé et Jacques Toubon, ainsi que l'UDF Alain Madelin
soutenaient Jacques Chirac. Les sondages très défavorables à Jacques Chirac avaient
poussé certains à lui conseiller de renoncer pour ne pas subir une défaite
cuisante. Il a pourtant gagné contre les prévisions.
Aujourd’hui,
les conseils des États-majors ne suffisent plus à orienter l’électeur qui
refuse les consignes du parti. C’est ainsi que les «éléphants»
socialistes ont tendance à bouder le candidat officiel parce qu’il ne les fait
plus rêver tandis qu’à droite, peu sont réellement ouverts aux directives tardives
de Sarkozy, Le Maire, Estrosi, Juppé et consorts qui leur enjoignent de voter
Fillon malgré la haine qui ne s’est pas encore estompée à son égard.
Alors,
nul n’est capable aujourd’hui de dire avec précision lesquels des deux
candidats sortiront au final des urnes, au premier tour. Ceux qui tiennent la
corde dans cette course peuvent s’écrouler sur la ligne d’arrivée, gênés par
ceux qui leur refusent la victoire par jalousie, haine, calcul médiocre ou antipathie. Les «petits»
candidats pourraient s’avérer plus puissants que les «grands»
parce qu’ils peuvent influer sur l’ordre d’arrivée. Un autre, spécialiste de la dernière ligne droite, pourrait coiffer au poteau les deux favoris.
Les sondages sont une image
à un instant T, souvent déformée parce que les sondés camouflent leur véritable vote ou que les
électeurs changent d’avis à la dernière minute. La certitude viendra uniquement
du résultat du scrutin parce que le combat durera jusqu’à la dernière minute,
jusqu’au dernier souffle, jusqu’au dernier argument et peut-être jusqu’à la
dernière révélation.
Regardons
donc les sondages avec curiosité mais sans certitude. S’il y a une
rigueur scientifique dans ces calculs, ils ne prennent pas en compte l’état d’esprit
de l’électeur soumis au matraquage des media et qui finit par imposer sa propre
vision électorale à l'intérieur de l'isoloir. Anticiper une victoire ou même une défaite ferait preuve d'absence de sens politique.
3 commentaires:
Exact rien n'est joue
Chaban -Delmas a été largement détruit par le Canard plus que par son camps tout comme aujourd'hui l'est Fillon par le même media suivit par ses confrères, le condamnant d'office. Les états-majors ne suffisent plus à démontrer le bien-fondé de leur candidat. Les media ont pris le pas sur eux à longueur d'articles élogieux en faveur de Macron.
Mais Il est vrai que les français sont anticonformistes et que "le Messie des media" risque de faire l'effet contraire du but recherché.
En définitive, il faut espérer que les électeurs, écœurés par cette désastreuse campagne ne désignent comme grands gagnants soit le vote blanc soit le vote nul soit l'abstention.
Avec pour résultat MLP au pouvoir.
Bien cordialement
Le Pen qualifiée pour le second tour ? Presque certain.
Fillon devant Macron ? Si les électeurs de gauche se partagent entre Mélenchon et Hamon plus Poutou et Arthaud, Il faut que Macron séduise beaucoup d'électeurs de la Droite et du Centre pour être au second tour. Et s'il y a un sursaut identitaire des électeurs de Droite qui retournent au foyer déserté à cause des " affaires" et des calomnies, Il n'est pas exclu d'avoir un second tour MLP-FF .
Le cauchemar : MLP - JL Mélenchon qui entraînerait le choix El Al -Air France.
André M
Tribune juive
Enregistrer un commentaire